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Urgences 2018 : un congrès sous tension

L’ensemble des équipes de médecine d’urgence se sont retrouvées lors du Congrès Urgences 2018 qui se tient à Paris du 13 au 15 juin. Dans un contexte difficile où les services sont soumis à rude épreuve, cet évènement donne l’occasion de dresser un état des lieux des urgences en France, et de proposer des réformes.

“Le 15 reçoit 31 millons d’appels par an alors que dans le même temps les services des urgences accueillent 20 millions de personnes chaque année”. Présidente de la Société française de médecine d’urgence (SFMU), le Dr Agnès Ricard Hibon rappelle, à travers ces chiffes, que les professionnels de la médecine d’urgence sont soumis à une demande toujours plus forte et croissante de consultations et d’hospitalisations. Dans un contexte difficile – marqué notamment par l’affaire Naomi Musenga, du nom de cette jeune femme décédée après avoir passé un appel de détresse auprès du SAMU de Strasbourg (67) – les professionnels des urgences – qui dénonçent depuis de longs mois des services surchargés – se sont retrouvés au 12e congrès Urgences organisé à Paris du 13 au 15 juin par la SFMU et Samu urgences de France. L’occasion de mettre en avant les évolutions positives qui ont été mises en oeuvre, à l’image du diplôme d’études spécialisées (DES) de médecine d’urgence mis en place en 2017. Une première année qui a vu 470 internes se former à cette spécialité. 

 

Plus de 100 000 patients en manque de lits

Pas question pour autant de passer sous silence les problématiques auxquelles sont confrontées les services. Le “No Bed challenge” s’inscrit dans cette démarche. Il vise à alerter les pouvoirs publics du problème de surcharge des urgences en répertoriant tous les matins avant 10 heures le nombre de patients qui ont passé la nuit sur un brancard faute de lits d’hospitalisation disponibles. Depuis le 6 janvier dernier, ce sont près de 150 services d’urgence qui déclarent, plus ou moins régulièrement, le nombre de patients. “Nous avons recensé pas moins de 36 000 patients concernés pour ces seuls services, déplore le Dr François Braun. On peut estimer qu’au niveau national, il y a trois fois plus de patients impactés, soit plus de 100 000 personnes. Si ce n’est pas un scandale sanitaire, je ne sais pas ce que c’est !”, ajoute le président de Samu urgences de France qui est à l’origine du No Bed challenge.

 

Un impact direct sur la mortalité 

Une surcharge des services qui est avant tout multifactorielle, avec en amont une défaillance de la médecine de ville à assurer la continuité des soins poussant toujours plus de patients en manque de solution vers les services d’urgence ; et en aval une surcharge des services de médecine – chirurgie – obstétrique (MCO) et une incapacité à obtenir des lits disponibles rendant impossible l’hospitalisation des patients à partir des services d’urgences. Une situation degradée qui a un impact direct sur la santé des personnes prises en charge “avec une augmentation de la mortalité de 9 % pour tous les patients, et de 30 % pour les plus graves. Sans oublier les durées de séjour prolongées pour les personnes âgées, ou encore une mauvaise prise en charge de la douleur…”

 

Quelles solutions ? 

“On évoque à nouveau la sur-sollicitation des urgences mais l’impression de désorganisation est fausse, annonce le Dr Mathias Wargon, chef de service urgences du SMUR de l’hôpital Delafontaine à Saint-Denis (93). Or, pour pouvoir prévenir les crises, mesurer l’encombrement des urgences, et fournir une information fiable au public de nombreux indicateurs ont été développés et étudiés, comme les flux de patients, les facteurs d’attente, la prévision de l’activité, la simulation des services, l’analyse des process”. Des recherches qui ont permis de faire évoluer les urgences, du modèle médico-chirurgical au modèle par flux de gravité. Une évolution qui repose sur le tri des patients à l’arrivée dans le but de les prioriser.  Le fonctionnement des urgences est également étudié afin de permettre l’évaluation, mais également de réduire le taux d’erreur. “Une étude parue récemment dans le JAMA (Journal of the American Medical Association) a montré que des staffs réguliers au cours de la journée réduisaient de près de 40 % les erreurs médicales.” En plus de renforcer les forces de la régulation médicale, en mettant notamment en place une formation d’Assistant de régulation médicale (ARM) reconnue par l’Etat, les spécialistes recommandent d’organiser une campagne grand public. Objectif : sensibiliser la population aux bonnes pratiques afin d’éviter une surcharge toujours plus importante des services.

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