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Journée de la femme : 3 portraits par Secours Mag

A l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, Secours Mag vous livre le portrait de trois femmes engagées dans l’univers du secours et des soins d’urgence.

Morgane Richard

Bénévole mais aussi salariée des Secouristes français Croix Blanche, Morgane Richard est sur tous les fronts quand il s’agit de s’investir pour son association. Son dynamisme et sa détermination lui ont permis d’ailleurs d’évoluer très rapidement au sein de cette dernière.

 

(c) Sylvain Ley / Secours Mag

Le bénévolat est une part extrêmement importante de ma vie

Malgré le peu d’heures de sommeil qu’elle a pu engranger, Morgane Richard reste souriante et pleine de vie. Depuis la veille, elle est en poste au sein d’un DPS tenu par les Secouristes français Croix Blanche aux 24 heures du Mans Moto. Par 8°C, assise sur un banc abrité de la pluie par un barnum, elle commence à se livrer. La jeune femme de 27 ans n’était pas destinée à faire du secours une part importante – pour ne pas dire centrale – de sa vie. Elle s’engage tout d’abord dans un diplôme d’arts appliqués pour suivre une carrière dans la mode, mais les perspectives d’avenir la lassent. Détentrice du BAFA, la nantaise d’origine se dirige alors vers l’animation. C’est là qu’elle touche du doigt pour la première fois l’univers des premiers secours. En passant le PSC1, elle fait une rencontre marquante avec une formatrice des Secouristes français Croix Blanche qui lui propose de devenir bénévole au sein de l’association. L’idée la séduit, mais reste dans un coin de sa tête. Ce n’est que deux ans plus tard, après un recyclage, que Morgane décide de franchir le cap. Elle s’engage dans l’association locale située à côté de chez elle, où on lui propose de passer rapidement le PSE. Mais Morgane n’est pas du genre à ne s’investir qu’en partie. Les cadres de l’association s’en aperçoivent et lui proposent de s’occuper du matériel, ce qu’elle accepte immédiatement. L’ambiance est bonne et les rapports humains qu’elle découvre en tant que bénévole suffisent à lui donner envie de s’engager plus avant. Elle devient formatrice PSC1 et découvre un univers qui la passionne.

 

Un bouillonnement constant

« J’ai toujours eu du mal à rester assise à écouter quelqu’un, alors quand je forme, je fais tout pour inviter les stagiaires à bouger. » Effectivement, Morgane ne tient pas en place. Il lui faut relever de nouveaux défis. On lui propose alors de faire des vacations au sein du comité départemental des Secouristes français Croix Blanche. Elle accepte tout en continuant, bien entendu, le bénévolat dans son association locale. Avec le temps, les vacations se transforment en un poste fixe à temps plein. Morgane a notamment pour mission de faire de la formation et met un premier pied dans l’univers de la communication. « Le bénévolat est une part extrêmement importante de ma vie et je ne compte pas les heures », assure Morgane, les yeux brillants de motivation. Elle finit alors par intégrer le groupe communication de la fédération nationale. « Je veux donner de moi pour en faire profiter l’association. Nous sommes une petite structure et la population nous connaît mal. J’aimerais qu’un jour les gens arrêtent de nous demander si la Croix Blanche est une filiale de la Croix-Rouge. »  

Elle a conscience cependant que pour cela, il faut des moyens, pas toujours évidents à trouver pour une « petite » association. En revanche, Morgane ne manque pas d’inspiration. « Mon cerveau fuse en idées », lâche-t-elle. En effet, en une minute, elle en liste une dizaine.

Texte et photo : Sylvain Ley. Portrait réalisé en 2016.

 

Dr Suzanne Tartière

Médecin régulateur au SAMU 75 depuis plus de 30 ans, le Dr Suzanne Tartière a vu le métier évoluer et n’est pas pour rien dans sa transformation. Portrait d’une femme médecin qui a fait de l’urgence son crédo mais qui regarde bien au-delà de la simple blessure physique.

 

D’abord une parole. Une parole qui vous emporte comme une partition que l’on ne peut interrompre. Parce que cette parole, avec son rythme effréné, agit sur vous comme un charme captivant que l’on n’a pas envie d’interrompre. Suzanne Tartière aime parler, c’est incontestable. Mais elle sait aussi écouter.

Répondre à une urgence, c’est savoir prendre son temps.

Etait-elle prédestinée à devenir médecin régulateur au SAMU ? Elle ne se prononce pas, mais son parcours parle pour elle. Il débute à la fac de médecine de Bordeaux, car, pour celle qui est née à Rabat (Maroc) et qui y a vécu jusqu’à l’obtention de son bac à 17 ans, Paris est « trop impressionnant ». Gardant en elle le souvenir de son médecin de famille, Suzanne Tartière veut d’abord s’engager dans un cursus de médecine générale, car elle aime toucher à tout. Mais son côté « bricoleur », qu’elle découvre très tôt avec sa boite de montage électronique, l’engage à s’aventurer dans le monde de l’urgence. Après deux ans de stages au SAMU d’Agen, elle trouve une forme d’accomplissement : l’aspect polyvalent de la médecine générale et le volet technique et débrouillard qu’elle aime tant. La capitale finit tout de même par la conquérir – ou est-ce l’inverse ? – et voilà que Suzanne Tartière, alors anesthésiste-réanimateur – « la voie royale à l’époque pour le SAMU » – gagne Paris. Mais son itinéraire la conduit d’abord à Créteil, deux ans durant, où elle fait la rencontre du professeur Pierre Huguenard, son mentor. « Un homme extraordinaire », fondateur du SAMU, qui après une heure d’entretien la séduit totalement. C’est à Créteil également qu’elle croise le chemin du Dr Xavier Emmanuelli, père du SAMU social, avec qui elle lie une amitié de plus de 35 ans aujourd’hui.

 

Le pouvoir des mots

Au SAMU de Paris, elle découvre le monde de la régulation et de « tout ce que l’on peut faire avec un téléphone ». Elle prend conscience du pouvoir des mots et en particulier de trois d’entre eux : « Je suis médecin ». Ces mots qu’elle aime tant prennent une place considérable dans son approche des victimes. Derrière un combiné comme sur le terrain, elle veut comprendre avant d’agir. Ou pour agir… « Répondre à une urgence, c’est savoir prendre son temps. » L’écoute est pour elle primordiale. Derrière les appels qui lui parviennent du 15, elle imagine une situation, une vie. Si elle diligente des moyens d’intervention rapidement, elle prend toujours un peu de temps avant de raccrocher. Derrière un appel au secours, Suzanne voit d’abord une détresse. Une détresse souvent d’ordre social. Encore un mot qui résonne chez elle et qui deviendra au fil de sa carrière un leitmotiv. Ce sont ses collègues régulateurs qui lui en font prendre conscience. « Tu fais du social Suzanne », « Tiens, cet appel, c’est pour Suzanne », plaisante à demi-mots son entourage. Lorsque le Dr Emmanuelli fonde le Samu social, « le 115 », Suzanne Tartière s’y investit forcément et intègre l’équipe de direction. Une « sacrée expérience » dit-elle. En effet, puisqu’elle dure tout de même 15 ans… « Le social, c’est 30 % des appels au 15. Le social est partout, même s’il est facile de ne pas vouloir le voir. » Ce mot, encore et toujours, elle le répète sans cesse. Mais elle agit aussi pour tenter de lui donner un sens. Après son « expérience » au 115, elle participe, encore avec Xavier Emmanuelli mais aussi avec le Pr Pierre Carli, à la création de l’association « Les transmetteurs », qui favorise le maintien ou la reconstruction du lien social grâce au concours de médecins en retraite. Puis elle donne le jour, toujours avec ses deux fidèles comparses, aux équipes mobiles d’urgences médicosociales. Très récemment, elle parvient même à expérimenter une garde H 24 de conseils téléphoniques avec l’assistante sociale en chef de l’hôpital Necker… Impossible de dresser une liste exhaustive de tous les projets, avérés ou en réflexion, qui animent le Dr Tartière. Car cette femme, pour qui la transmission et l’écoute sont deux piliers fondateurs, n’est pas prête de raccrocher…

Texte : Sylvain Ley / Photo : Nicolas Beaumont. Portrait réalisé en 2017

 

Laurence Gallet

Née en Alsace, Laurence Gallet a la bougeotte. D’ailleurs lorsqu’on lui demande d’où elle vient, elle hésite presque… Un rythme pas banal que lui impose son métier d’assistante de vol.

Sans concession, Laurence Gallet avance être totalement épanouie par ce métier qui unit sa passion pour le vol au fil rouge de sa vie : le secourisme. « Je suis un peu tombée dedans quand j’étais petite : ma mère était ambulancière à la Croix-Rouge et mon père, pilote d’hélicoptère dans l’armée, faisait des évacuations sanitaires pendant les guerres d’Algérie et d’Indochine. »

Construire une bulle de sécurité autour de l’équipe médicale

Pourtant, si cette famille lui inculque les valeurs du secourisme, ce n’est pas vers cette voie qu’elle se tourne en premier lieu. « J’ai toujours aimé aider, j’ai un côté Saint-Bernard. D’ailleurs, quand j’étais gamine, nous faisions beaucoup de pêche en mer et il n’était pas rare d’aller chercher des personnes en difficulté. J’ai été élevée comme ça. » Elle fait de l’animation pendant plusieurs années, armée d’un BAFA et d’un simple diplôme de surveillant de baignade, puis c’est le secrétariat de direction qui lui prend six années de sa vie. Une période « de stabilisation » et le moment de fonder une famille. En parallèle, Laurence Gallet se forme comme pilote d’avion privé. « Une véritable révélation », qui l’amène à postuler dans une école de pilotage où elle prend rapidement en charge des programmes pédagogiques. Elle y apprend notamment à voler sur hélicoptère mais la crise arrive et l’école doit fermer ses portes. « D’anciens collègues me poussent alors à contacter une entreprise belge qui cherche des assistants de vol, un nouveau job qui débarque en Europe. »

 

Assistant de vol : un métier méconnu

La mission consiste à voler dans des hélicoptères sanitaires (du SAMU, NDLR) et à assister les pilotes en vol ainsi que les équipes médicales au sol. Après quelques temps, la société NHV fait appel à elle, une seconde révélation. « Je suis à ma place : ce métier regroupe ce qui compte pour moi. » Au fil des missions, et d’une en particulier, c’est l’électrochoc. « Un motard avait percuté une voiture, ça a été tragique, la personne ne s’en est pas sortie mais j’ai découvert ce rapport très particulier entre médecins et infirmiers qui, d’un seul regard, savent se parler pour aider la victime. » Elle décide de remettre ses connaissances en secourisme à jour afin d’aider si besoin. Son quotidien : construire une bulle de sécurité autour de l’équipe médicale, brancarder et assister les médecins si nécessaire.

Désormais, elle défend bec et ongles ce métier. « C’est une profession qui n’existe pas en France, car il y a encore des dérogations. Ce sont des dépenses supplémentaires, mais c’est aussi un gage de sécurité, notamment lors des vols de nuit ou dans des conditions dégradées. Etre deux pour assurer la sécurité, ce n’est pas négligeable, et on permet à l’équipe médicale de rester au plus près du patient. »

 

Texte : Aurélie Renne / Photo : DR. Portrait réalisé en 2015

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