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Réchauffement climatique et feux de forêt : que dit la science ?

Plus de 50 départs de feux ont été relevés entre le 23 et le 24 février 2019 en Corse, tandis que la préfecture des Alpes-Maritimes établit une période rouge jusqu’au 4 mars 2019 pendant laquelle l’emploi du feu est réglementé. Deux faits pas si exceptionnels en Corse, excepté au mois de février. On peut alors s’interroger sur ce que la science propose comme explications, notamment en regard du changement climatique.

Réchauffement climatique et feux de forêt sont deux objets d’études scientifiques très différents. Le premier ne peut s’appréhender qu’au niveau de la planète entière et dont les impacts s’inscrivent dans le temps long. Les feux de forêt quant à eux sont des événements localisés et brefs au regard des échelles de temps du changement climatique mondial. Ils partagent, néanmoins, une caractéristique commune : de très nombreux facteurs entrent en jeu. Il est bien compliqué d’isoler l’impact d’un seul facteur.

La question du lien entre réchauffement climatique et feux de forêt n’est pas nouvelle pour les scientifiques, comme en témoigne notamment l’étude “Climate change and forest fire potential in russian and canadian boreal forests” (Changement climatique et risque de feux dans les forêts boréales canadiennes et russes). Publiée il y a plus de 20 ans (en 1997) par une équipe internationale de chercheurs canadiens, allemands et américains, l’étude considère les données de la période 1980-1989, et cherche à comprendre l’impact de l’augmentation de la quantité de CO² en appliquant des modèles statistiques. L’étude conclut :

Il existe une forte similitude dans la configuration géographique de la gravité des incendies pour tous les modèles sous un climat avec un taux de C0² doublé, ce qui indique qu’une certaine confiance peut être placée sur le changement prédit. En général, tous les modèles montrent une augmentation significative de la superficie exposée au danger de feu élevé à extrême, en particulier du centre-sud et de la Sibérie.

Le lien, sans être exactement quantifié, est établi, au moins dans les forêts du nord de la planète.

Lorsqu’on décide d’aller plus loin dans l’étude de ce lien, l’une des premières pistes est de compter le nombre d’incendies de forêt, année après année, et de constater l’évolution. Mais le premier frein de cette méthode est la fiabilité des données. Aux USA, on estime que les données ne sont fiables et comparables qu’à partir de 1983.

Randy Eardley, porte-parole du National Interagency Fire Center, déclare :

Essayer de comparer les données les plus modernes avec les données antérieures n’est ni exact ni approprié, car nous n’avions pas le moyen de mesurer les données antérieures. A l’époque, nous n’avions pas de système de reporting fiable. Pour autant que je sache, celles-ci [les données avant 1983] proviennent d’une variété de sources différentes qui comptent souvent deux fois plus de chiffres. Quand vous regardez certaines de ces années qui totalisent 60 ou 70 millions d’acres brûlées, beaucoup d’acres doivent faire l’objet d’une double comptabilisation. Nous n’avions pas de système permettant d’estimer la superficie brûlée avant 1960, mais il a été vraiment affiné en 1983.

Compliqué alors de comprendre les éventuelles interdépendances.

En l’état le lien entre ces deux phénomènes est indiscutable pour de nombreux scientifiques, mais la compréhension fine de ce lien est encore en cours d’analyse. Il n’est alors pas exact de dire que le réchauffement climatique provoque des incendies de forêts, mais il les potentialise.

 

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